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Pierres vivantes artificielles

Introduction

La production de pierres vivantes artificielles est un aspect très important de l’aquariophilie récifale responsable. Les roches utilisées comme pierres vivantes ont mis plusieurs dizaines voir plusieurs centaines d’années à se former et servent à protéger le récif des agressions des vagues, de supports aux coraux, etc.

Les techniques de production de ces roches artificielles sont au point : elles sont utilisées par les aquariums publics américains depuis très longtemps. Mais peu de récifalistes osent franchir le pas, sans doute par manque de temps, mais aussi du fait de retours d’expériences pas toujours probants. Il est pourtant facile de se lancer et de faire changer cela !

Quelques bases

Différentes techniques sont disponibles pour la création de pierres artificielles à usage récifal. Le principe reste néanmoins toujours le même : l’utilisation d’une ou plusieurs matrices (aragonite, coquilles d’huîtres, etc.) et d’un liant.

On emploie le plus souvent comme liant du ciment Prompt (ciment destiné aux maçonneries en milieux marins). J’ai testé différents ciments tels que le ciment Portland standard, le ciment prompt ou le ciment blanc et je n’ai jusqu’à présent perçu aucune différence au niveau résistance ou largage de substances nocives. J’ai néanmoins une préférence pour employer des marques connues (Lafarge par exemple), de manière à avoir l’assurance d’un ciment de qualité supérieure.

Globalement, on mélange dans des proportions définies la « matrice » choisie et le liant. Il est préférable de bien nettoyer auparavant les « ingrédients » à l’eau claire pour retirer toutes poussières qui diminueraient la prise du ciment. Le mélange est ensuite coulé dans un moule ayant la forme désirée de la future pierre. Il est très important de bien mouiller ce dernier et de garder une humidité maximale durant une période minimale de 48h (par exemple en recouvrant le moule d’une bâche plastique). Le ciment en effet ne durcit pas en séchant (en perdant de l’eau), mais au contraire par hydratation ! Garder votre mélange humide permettra une résistance mécanique maximale et une porosité élevée. Et soyez patient : 48h de séchage est un minimum !

Pierres artificielles moulées et prêtes à être recouverte pour la phase de séchage

La deuxième étape, primordiale est celle de curage. Les pierres artificielles doivent impérativement perdre les différentes substances dissoutes issues du séchage du ciment. Pour se faire, on plonge ces pierres « fraîchement moulées » dans un grand volume d’eau douce propre et renouvelé périodiquement (au minimum deux fois par semaine). De cette manière, calcium, sulfites et autres substances en excès et potentiellement nocives pour l’aquarium vont se trouver diluées, délavées et éliminées. Une période de curage d’un minimum de 5 semaines est recommandée. Certaines personnes emploi différents acides (acide chlorhydrique, acide acétique) pour accélérer le curage. A mon sens, on ne neutralisera ainsi qu’une partie des composées, pas tous. Mieux vont donc laisser le temps et l’eau jouer leurs rôles. La fin de la période de curage peut être confirmée en effectuant des tests de pH. Si le pH de l’eau de curage augmente au bout de 72h (par exemple passage de 7.2 à 7.4), c’est que les pierres ne sont pas encore prêtes à rejoindre un aquarium : renouvelez l’eau et laissez tremper une semaine supplémentaire. Il est préférable d’être certain de la bonne neutralisation des pierres avant de les introduire dans un bac !

Dans mon cas, j'utilise une citerne de récupération d'eau de pluie : cela permet de stocker plusieurs dizaines de kilos de pierres et d'assurer un renouvèlement d'eau constant en hiver.

La citerne de stockage et curage des pierres artificielles
Emploi

Une fois neutralisées, les pierres peuvent être employées pour un usage récifal. Il faut néanmoins garder à l’esprit que ces pierres sont totalement inertes : aucune bactéries, microfaunes ne les colonisent !! Pour provoquer cette « invasion » bienvenue et nécessaire à la bonne marche d’un bac récifal, on pourra envisager différentes approches.

La plus connue consiste à effectuer un mélange de pierres artificielle et de pierres vivantes; on recommande généralement un ratio de 25% (pierres artificielles / pierres vivantes). Par exemple pour un aquarium de 100 litres, on utilisera : 100 litres x 20% = 20 kg de pierres au total ; dont : 20 kg x 25% = 5 kilos de pierres artificielles, le reste (15 kilos) étant composé de pierres vivantes. Les invertébrés et autres bactéries des pierres vivantes vont alors progressivement coloniser les pierres mortes, les rendant « vivantes » en quelques mois.


Pierre artificielle en aragonite et ciment prompt au bout de 2 mois de colonisation
(photo Nano76)


Une autre solution est de déposer dans la décantation ou la cuve principale d’un aquarium déjà mature quelques kilos de pierres artificielles. En maximisant les « hébergeurs », par exemple dans différents bacs et chez plusieurs récifalistes, on maximisera la biodiversité des pierres artificielles. On peut tout à fait envisager de bâtir un bac en utilisant exclusivement de telles pierres « colonisées », mais au bout d’un minimum de 2 mois de stockage.

Une méthode alternative (que je teste actuellement) est d’induire la colonisation des pierres artificielles en utilisant… des sédiments collectés dans différents bacs ! Ces sédiments sont en effet riches en spores, copépodes, isopodes, etc. En gardant les pierres dans des conditions « récifales » (c'est-à-dire à 27°, éclairées et aérées et en effectuant de réguliers changement d’eau), il devrait être possible d’induire une colonisation. La patience reste de mise : j’estime à un an le temps nécessaire à leur complète maturation !! Dans mon cas, j’utilise une cuve plastique (récupérateur d’eau de pluie) de 300 litres stockée avec près de 80 kilos de pierres artificielles. Après presque 2 mois de « mise en culture », les pierres ont déjà largement perdues leur couleur blanche initiale pour gagner une très belle teinte rouge vif du fait d’une… explosion de diatomées ! Ce bloom est en cours de régression et quelques tâches plus colorées (coraline) commencent à apparaitre de ci- de là. Quelques isopodes commencent aussi à montrer le bout de leurs antennes !

La cuve employée pour la maturation des pierres
(éclairage par T8, chauffé, brassé par un système de "trickling")

Quelques recettes


Eclats de coquilles d’huîtres

Ma méthode favorite : j’utilise des éclats de coquilles d’huîtres disponibles en graineteries ou auprès de coopératives agricoles. Le prix demandé est modeste (environ 10€ pour 25 kilos) et de tels sacs sont relativement facile à trouver.
12 volumes d’éclats de coquilles
2,5 volumes de ciment
Liens : Pierres vivantes artificielles : comment faire

Sable d’aragonite ou Maërl

La plus connue : le prix de l’aragonite est parfois rédhibitoire mais ses effets positifs en récifal sont indiscutables. On peut aussi envisager d’employer du maërl suffisamment fin
5 volumes de sable d’aragonite ou de maërl
1 volume de ciment
Liens: Making arocrete (TM) live rocks

Sel

Il est primordiale de choisir un sel avec des cristaux suffisamment gros : du gros sel de cuisine s’avère par exemple trop petit. Il est possible d’employer du sel destiné au déneigement, certains vont jusqu’à employer du sel adoucissant concassé.
4 volumes de sel
1 volume de ciment
Liens: The ultimate DIY live rocks

Facile, écologique, économique et sans limite !


Faire ses propres pierres, cela peut effectivement être tout cela à la fois. Avec un peu de patience, vos pierres artificielles trouveront rapidement leurs places dans vos bacs ou dans d’autres ! Et rien ne vous empêche de réaliser de cette manière des caches pour pompes de brassage, éléments techniques, supports de boutures… La seule limite est celle de votre imagination !

Autres liens

Le béton : comment résiste-t-il à l’eau de mer
La machine à pierres vivantes

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